Arbre de nouveau fleurissant, pierres
décoratives, chants d'oiseaux, air pur composent un paysage paisible où
l'on pourrait s'imaginer pour un jogging ou en picnic. Le cimetière
Arrahma ne transmet pas fidèlement l'image sinistre qu'on se fait des
cimetières.
Ceci est peut être dû au calme du lieu, ou bien les
épitaphes qui rappellent que cet endroit est occupé par la mort. Le
cimetière, situé à la commune de Dar Bouazza, à 20 km environ de Casablanca,
est un lieu bien propre et bien entretenu. Quoiqu'il s'agisse d'un lieu
funèbre, l'endroit est assez animé.
Non seulement par les 26 à 35
enterrements par jours qui prennent lieu dans le cimetière, mais plus
par la foule vivante de mendiants et «Gherraba» qui peuplent l'entrée
du lieu. Le cimetière est généralement plus mouvementé en été et
pendant Ramadan où il peut recevoir jusqu'à 46 morts.
Ceci est expliqué
par la difficulté que représentent ces périodes pour les personnes de
faible santé, et les accidents de la route qui s'accroissent pendant la
période estivale.
Cet espace est dirigé par un conseil de gestion rattaché au conseil de la ville de Casablanca
; représentants de la ville blanche et de la commune de Dar Bouazza le
composent. Il est surveillé par une équipe de sécurité dépêchée par la
société privée ayant remporté l'appel d'offre public.
Une autre société
privée assure, elle, la propreté des lieux.
Le cimetière tire ses
revenus des droits d'enterrement qui s'élèvent à 200 DH, le parking du
cimetière est loué à 240 000 DH, la participation du conseil de la
ville de Casablanca
atteint 120.000 DH, les caveaux sont cédés à 40.000 DH chacun.
Ces
derniers sont vendus à des familles souhaitant acquérir leur propre
parcelle de terre. Le prix n'est pas défini par sa superficie, mais
plutôt par le nombre de tombes qu'elle peut contenir. A titre
d'exemple, pour 40.000 DH un acheteur pourrait posséder un espace lui
permettant d'enterrer douze personnes, ce qui correspond à une
superficie d'environ 25m?.
La vente des caveaux représente une question
d'ordre moral pour les intervenants de ce «secteur» : «on est tous
égaux face à la mort, et on doit le rester à notre enterrement» affirme
Jaouad El Kohen, le président de l'association marocaine de solidarité
sociale et sauvegarde des cimetières.
La mort a, aussi, ses problèmes…
Jaouad
El Kohen qui a réalisé une étude sur l'état des cimetières du Maroc
qu'il a présentée et soumise au ministère de l'intérieur, nous a
déclaré que le plus grand problème réside dans l'insuffisance foncière.
Il tire la sonnette d'alarme en disant que « les marocains risqueraient
de ne plus trouver où enterrer leurs morts dans les 8 à 10 années à
venir.
En effet, c'est 60 ha de terre qui sont consommés chaque année.
Il faudrait que l'Etat trouve des terrains pour l'établissement de
nouveaux cimetières pour ne pas se retrouver dans une situation
délicate. «L'Etat dispose de nombreux terrains, il pourrait en vendre
aux wilayas ou aux communes à des prix bas ou symboliques comme ce qui
a été fait pour les cimetières Al Ghoufrane et Arrahma».
Il est aussi
question de la réhabilitation des cimetières ayant dépassés les 40 ans.
La période étant la durée nécessaire qui permet de réhabiliter et
réutiliser les terrains.
Si le cimetière Arrahma et Al Ghoufrane se
portent bien, ce n'est pas le cas pour les six autres cimetières de la
ville et particulièrement celui de la commune de Sidi Moumen. Le
cimetière est dans un sale état.
Le lieu de repos eternel pour les
morts, l'est devenu aussi pour les SDF et les délinquants. Le résultat
n'est pas surprenant, plusieurs vols et atteintes au respect dû aux
morts ont été signalés dans cette partie de la ville. Dans l'étude
réalisée par El Kohen, il est précisé que 75% des cimetières du royaume
sont dans un état «catastrophique» contre 15% dans un état moyen et 10%
en bon état. La charte communale est précise dans ce sens, la
responsabilité de l'entretien du cimetière revient principalement à la
commune et quelques autres intervenants comme le ministère de
l'intérieur, celui de la santé, la gendarmerie etc.
Ces intervenants
sont supposés maintenir la sécurité et l'entretien des lieux, mais
aussi la sensibilisation de la population de l'importance du respect
des tombes. Dans ce sens là, l'association marocaine de solidarité
sociale et sauvegarde des cimetières a appelé à une journée nationale
de sensibilisation au respect de la sacralité des tombes.
L'association
propose la date du 10 Ramadan, qui coïncide avec la date de la mort de
Feu Mohamed V, chaque année pour soutenir cette cause.
Sortir de la tombe ?
Le
va-et-vient à la porte des cimetières ne prend pas qu'une seule
direction. Il arrive des fois qu'un corps est exhumé de sa tombe pour
quelques raisons.
De teks cas sont très rares, une dizaine par an dans
tout le royaume, selon docteur Boucheta Farida, médecin chef du
département de médecine légale de Casablanca.
L'exhumation est une procédure qui ne se fait que par ordre directe du
procureur du roi, qui ne donne le droit d'effectuer cette opération que
dans certains cas. Il s'agit de cas comme le doute qui plane sur la
mort d'une personne, ou le souhait des membres de famille de faire
rejoindre le corps d'un proche à un caveau familial, mais la plupart
des cas restent cependant le transport d'un corps d'une tombe
clandestine à un vrai cimetière dans le but de lui rendre son respect
et lui permettre des funérailles dignes.
Mais la tâche n'est pas
facile, l'exposition à un corps décomposé est une chose très sérieuse,
au niveau légal et celui sanitaire. L'exhumation ne se fait que par la
présence d'une commission qui représente les autorités légales, ainsi
que la direction du cimetière et un membre de la famille du mort.
Plusieurs désinfections sont ensuite effectuées avant l'ouverture de la
tombe et l'extraction du corps. Le corps est ensuite mis dans un étui
spécial. Une fois l'autopsie faite le corps est rapatrié vers sa tombe
pour retrouver le repos éternel.
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