C’est une bien triste journée qu’a célébrée le monde dimanche
dernier : la Journée internationale pour l’élimination de la violence
contre les femmes.
Une journée qui vient, chaque année, nous rappeler
que les femmes, malgré les avancées juridiques et réglementaires
réalisées dans le cadre de la protection de leurs droits, elles
continuent de souffrir de différents types de violences et la subissent
parfois en silence.
Dans les actes de violence que subissent les
femmes, et au-delà des coups sonores et qui laissent des traces plus ou
moins visibles sur le corps, il est une agression plus sournoise et
beaucoup plus désastreuse, il s’agit de la violence psychologique.
En
effet, même si cette dernière continue d’être perçue comme moins
importante par certains, elle constitue la violence la plus répandue
dans notre société et ses effets peuvent se révéler destructeurs.
«Avant de parler chiffres, il faut d’abord définir le terme
“violence à l’égard des femmes”. Ce dernier doit être compris comme une
violation des droits de l’Homme et une forme de discrimination à
l’égard des femmes, et désigne tous les actes de violence fondés sur le
genre qui entraînent, ou sont susceptibles d’entraîner pour les femmes,
des dommages ou souffrances de nature physique, sexuelle, psychologique
ou économique, y compris la menace de se livrer à de tels actes, la
contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la
vie publique ou privée», explique la Ligue démocratique pour les droits
de la femme (LDDF).
Et d’ajouter : «la violence psychologique.
Il s’agit de tout acte de
violence qui entraine des souffrances psychologiques à la femme. On
peut citer à titre d’exemple : la violence verbale à travers les
insultes et les injures, le mauvais traitement, l’humiliation, la
menace d’assassinat et toute autres forme de menaces, la domination et
isolation de la femme de son entourage et de sa famille, la privation
des libertés...».
Même son de cloche du côté de l’Association
marocaine de lutte contre la violence à l’égard des femmes (AMVEF) qui
affirme que : «La violence psychologique est liée à toutes les autres
formes de violence et se manifeste dans tous les comportements qui
touchent à la personnalité de la femme et sa bonne santé mentale, comme
insulte, humiliation, mépris, manque de communication, non-respect de
son avis dans la famille…».
Par ailleurs, selon les résultats de la dernière enquête réalisée
par le Haut Commissariat au Plan (HCP) et publiée en 2011, sur une
population de 9,5 millions de femmes âgées de 18 à 64 ans, près de 6
millions, soit 62,8% d’entre elles, ont subi un acte de violence sous
une forme ou une autre, dont 3,8 millions en milieu urbain et 2,2
millions en milieu rural.
Par ailleurs, tous contextes confondus, la
violence psychologique est la plus répandue, avec un taux de prévalence
de 48,4%, soit 4,6 millions de femmes qui en sont victimes au cours des
12 mois précédant l’enquête (3 millions en milieu urbain et 1,6 million
en milieu rural).
La prédominance de la violence psychologique est ce qui ressort
également du rapport 2010/2011 du réseau LDDF-Injad contre la violence
du genre, qui est une structure qui relève de la Ligue.
En effet,
d’après ce rapport, la violence psychologique est la plus répandue par
rapport aux autres formes de violence avec un taux de 42%, avec un
effectif d’actes de violence de 5 718 actes.
Le centre d’écoute et d’orientation juridique et de soutien
psychologique pour femmes victimes de violence, qui relève de l’AMVEF a
également relevé le même taux de plaintes quant à la violence
psychologique. «Près de 40% des femmes qui nous appellent souffrent de
violence psychologique.
Ce type de violence est donc largement
prédominant», souligne-t-on auprès de l’association.
Contrairement aux résultats précités, le Centre SOS Annajada de
Casablanca, mis en place par l’Union de l’action féminine (UAF), a
enregistré, quant à lui, que la violence la plus répandue est celle
physique avec un taux de 40,39%, alors que la violence psychologique
arrive en seconde place avec 19% des plaintes.
Par contre, toutes
les associations qui militent dans la lutte contre la violence à
l’égard des femmes sont d’accord pour dire que la violence touche
toutes les couches socio-économiques confondues. Qu’elle soit riche ou
pauvre, instruite ou analphabète, active ou au foyer, mariée ou
célibataire… la femme souffre de violence psychologique de manière
presque quotidienne.
La violence fondée sur le genre a en effet, un caractère transversal
et «démocratique».
Elle touche toutes les catégories de femmes
indépendamment de leur situation socio-économique et se manifeste dans
les différents milieux sociaux : conjugal, familial ou public.
À propos, quand peut-on parler de violence psychologique et quel est son impact la vie de la victime ?
«On
parle de violence psychologique à partir du moment où la violence
impacte le psychique de la victime, c’est-à-dire, lorsqu’elle fait
effraction dans l’inconscient de cette dernière et crée un déséquilibre
psychique», explique Mohamed Hachem Tyal, psychiatre, qui précise :
«Cette effraction nécessite un rééquilibrage du psychisme de la
personne, ce qui peut bien, moyennement bien ou mal se faire, selon la
force de l’agression et celle de la victime.
Le problème qui existe dans la violence contre les femmes est qu’on
ne tient pas suffisamment compte de la gravité de l’impact de la chose».
Le
psychiatre affirme également qu’en cas de mauvaise reconstruction
psychologique de la victime, cette dernière peut souffrir de ce qu’on
appelle le «syndrome post-traumatique». «C’est ce genre de mauvaise
reconstruction qui fait que la victime se met à revivre l’évènement
traumatisant et a du mal à continuer à vivre.
En effet, cela peut créer des angoisses, des troubles de sommeil,
des sautes d’humeur… la violence peut être un véritable désastre dans
la vie de la victime, d’où l’importance de tenir en compte cet aspect
psychologique», insiste Dr Tyal. Et de poursuivre : «Ce qu’il faut
comprendre, c’est que plus la victime est prise en charge rapidement
par un spécialiste, plus elle a des chances que le rééquilibrage se
fait dans de meilleures conditions. Il faut aussi prendre en
considération que cela impacte la vie de la personne sur le moyen et le
long terme et que la gravité de l’impact physique varie selon l’impact
psychologique qu’il cause».
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